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We Art Together news

FIAC 2013 : plus de profondeur Duchamp 

Quelle est la typicité de la FIAC 2013. Cette cuvée surpasse-t-elle les éditions précédentes ? Quels sont ses arômes, ses tanins, sa prodondeur, son potentiel de garde ?

Sa couleur ? Cette dernière réponse est simple. Le rouge de Poliakoff.

 

Sa destination : le multiculturalisme porté par le pool et l’avant-garde des galeries internationales.

Analyse volontiers subjective de We Art Together.
 

FIAC ou FIAM ? 

Constat liminaire, la FIAC pourrait se renommer FIAM tant l’art moderne semble y occuper une place croissante : toujours Basquiat, Picasso, Matisse, Dubuffet, Man Ray, Picabia, Louise Bourgeois, Niki de Saint Phalle, Calder, De Kooning, et enfin, les presque modernes Soulages et Buren.

Et de fait, les œuvres (huile et gouaches) de Serge Poliakoff  - qui bénéficie de deux expositions concomitantes au MAM et à Maillol – ont fait l’objet d’une authentique « razzia » au stand monographique de la galerie Applicat-Prazan, qui, bien que ne présentant les œuvres que d’un seul et unique artiste sut choisir le bon.

Dès l’ouverture de la FIAC, la presque totalité des œuvres étaient déjà vendues. Une exception.

Deuxième constat. La belle résilience des galeries indépendantes moins fameuses que Gagosian & co – Gagosian qui, au passage, nous offre un beau moment de fantaisie avec le « Wile E Coyote » de Dan Colen traversant de part en part son stand - et ce, alors même que la vogue des Fondations édifiées par les collectionneurs prestigieux menace le microcosme de l’art contemporain.

 

Méga Manga

Manga-street-mania au stand du galeriste de Murakami, Emmanuel Perrotin, qui accueille deux oeuvres de l'artiste new-yorkais KAWS. Une acrylique sur toile, "NYT", graph manga décomposé en huit panneaux à la présence intense. Et la sculpture sur bois monumentale, "Better knowing", plus inattendue dans le répertoire street art de cet artiste.


Contre-message économique et artistique : « No pressure »

« No pressure » ou l’affirmation ironique et dilettante de ces néo-résistants de l’art, c’est le titre de l’encre sur papier d’Olaf Breuning qu’expose la galerie new-yorkaise Metro Pictures.

 A quelques mètres, la galerie Capitain Petzel à Berlin délivre in extenso une ode à l’argentique à travers ce tirage nostalgique en forme de didascalie de Christopher Williams montrant l’ouverture d’un Exakta Varex surmonté d’une optique Carl Zeiss.

 

L’arbre de vie
 

 Cette session de la FIAC, de prime abord moins spectaculaire, (certes, Bertrand Lavier a embouti sa Ferrari pour la Fiac – « Dino », œuvre créée en 1993 - mais ça ne vaut pas les avions tressées d’Adel Abdessemed crashés au Centre Pompidou…), affiche en revanche plus de profondeur de champ, et c’est particulièrement réjouissant. 

Le monumentalisme n’a cependant pas déserté les stands. Mais il s’agit d’un gigantisme sobre, épuré, sémiologique. Le promeneur de la FIAC est ainsi accueilli par l’immense sculpture arborée d’Ai Weiwei, « Iron tree » à la galerie Neugerriemschneider, auquel répond la souche à l’intérieur doré de Giuseppe Penone à la Gagosian Gallery. Le land art s’intérioriserait-il ?

 

Chasser le naturel…
 
Il revient donc à la Fiac.

Plus de Nature, moins de bling, plus de densité et de sincérité.

Le polyptique de Matt Mullican, à la Galerie Micheline Szwajcer, à Anvers, nous livre une ode résolument verte aux cinq éléments.

Un lion en trompe-l’œil se découpe d’un empilement de sacs militaires contenant de la sciure (Julien Audebert, Art : Concept, Paris).

La cueillette des champignons hallucinogènes (amanite tue-mouches, on déconseille) est même possible à la galerie « Air de Paris ».

La 300 Gallery New York offre au passant le (mot) coucher de soleil de Doug Aitken, qui, effet trompe-l’œil de l’acrylique, semble criblé de balles.

En 2013, au stand de la Galerie Vallois, Gilles Barbier joue l’antithèse et prend franchement le parti de l’écologie. Le collectionneur aura à choisir entre la mise en abyme hyperréaliste d’une cité décadente que dénonce son « Plateau aux hamburgers » et la vision  (« Still Memory 8 ») d’une prophyllaxie bénéfique entre écologie et culture - osmose parfaitement incarnée par le contenant architectural luxuriant du Quai Branly et le projet culturel d’exception que défend quotidiennement ce musée ambitieux.

Au premier étage, la taxinomie se mue en regard archéologique via l’installation d’Inaki BONILLAS, à la galerie barcelonaise PROJECTESD. 

 

L’art autrement  

L’art, c’est parfois du sport. 

L’installation de David Adamo (« the rite of the spring ») constitue le plancher même du stand de la galerie Peter Freeman. D’anciennes battes de baseball poncées ou dévernies, alignées tête-bêche, sur lesquelles l’on se doit d’avancer prudemment. Une réussite visuelle qui met ce mythe américain à nos pieds. 

Une œuvre d’art, c’est également réversible.

Philippe Gronon, dans le 23e opus de sa série Versos, a reproduit le verso du célèbre Love d’indiana en dépôt au Mamac de Nice.

Un tirage limité (pigment print en 3 exemplaires) de grand format à l’esthétisme confondant. Les amateurs d’art ancien connaissaient l’attraction que provoquent certains châssis et des plus anonymes ; les amateurs d’art moderne et contemporain probablement moins. 

L’art, ça passe aussi par les chiens !

Mention drolatique pour « L’archéologie pour chiens » de Théo Mercier et sa collection d’os à mâcher, réunie en 2013.

L’art de tisser sa toile

Rachel Harrison (painting in shorts) et Tom Burr (Yet to be titled) n’hésitent pas à rhabiller l’art pictural avec force caleçon de bain et tissu au motif de marinière.

Tandis que Joseph Havel déshabille sa structure avec son tableau textile uniquement constitué d’étiquettes de soie brodées. 

 

L’art de chinoiser

Deux œuvres magnétiques très sarcastiques de Yue Minjun au stand de Daniel Templon dialoguent avec la sculpture géopolitique « Time to make plans » de Ji Wenyu et Zhu Weibing pour la Galerie ShanghART.

Tout l’art est dans le geste.

Le plexiglas introduit de nouvelles possibilités qu’a exploré en virtuose Jean-Marc Bustamante – digne successeur de Gérard Schneider ? - dans ses peintures sur plexiglas, à la galerie Thaddaeus Ropac.

Un regard sur l’histoire

La tapisserie, cet art des rois, raffiné, narratif, mémoriel, qui s’est éteint avec l’agonie de la manufacture des Gobelins, est ressucité par William Kentridge, dans son œuvre « Aegyptus Inferior, 2007-2008, Galerie Marian Goodman. Une brillante exégèse.

Achevons notre tour d’horizon nourrissant par les fascinantes arabesques de Christopher Wool à la Vedovi gallery de Bruxelles. 


En conclusion,
moins de détournement d’objets(on croise tout de même des têtes de hure vissée sur un attelage rouillé et des tableaux en pailles à cocktail), d’installations rocambolesques mais plus de profondeur de champ, du sens et de l’invention à chaque stand.

Cette session 2013 qui stimule l’imagination de l’artiste comme de son récepteur, apparaît donc vivifiante.

La Fiac 2013 affiche même un semblant de continuité entre l’art des modernes déjà consacrés et l’art des rejetons contemporains.

L’art cinétique trouve par exemple de fiers représentants. A travers des transpositions tenant parfois du jeu vidéo, comme cet écran tactile d’AGAM à la dénomination facétieusement alambiquée « Au-delà de l’image invisible dans le temps ».

Décernons enfin un César majeur du détournement d’objet au Bouddha multifonctions de Rudolf Stingel. Une réussite. 

 

Bref, si la Fiac 2013 fait la part belle à l’art moderne, les artistes contemporains assurent la relève sans tape-à-l’œil, avec une réjouissante relecture du passé, créative et projetée vers l’avenir.
Mentionnons, enfin, que le Prix Marcel Duchamp 2013 a été décerné à la talentueuse Latifa Echakhch.
 

A voir également, le parcours Hors les murs de la Fiac 2013 aux Tuileries, Jardins des Plantes, sur les berges de la Seine et devant le Petit Palais.